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basilic en buisson originaire du Chili (Ocimum minimum),
famille des Labiées
Selon Aristote, basilicum vient du latin basiliscus, emprunté au grec basilikos (petit roi ou royal), la plante étant désignée sous le nom de basilikon. Ocimum vient du grec oza qui signifie odeur. Le basilic est originaire d’Inde et du Moyen-Orient.
Les Romains pensaient qu’une tige offerte à une fiancée provoquait en elle un amour éternel. D’autre part, il était réputé engendrer la sympathie et apaiser la colère ; les Romains avaient donc coutume de servir des salades de basilic aux amoureux qui se querellaient et les magistrats, quant à eux, tranchaient les litiges devant une potée de basilic. Pour obtenir une bonne récolte, les agriculteurs de l’époque étaient réputés pour leurs hurlements et leurs imprécations lorsqu’ils plantaient les graines de basilic. Un mythe grec prétendait que l’odeur forte de la plante rendait les hommes fous.
Le basilic a longtemps été associé au romantisme. Les femmes italiennes plaçaient un plant de basilic sous leur fenêtre afin de prévenir leur amoureux qu’il pouvait se présenter cette nuit-là. Le basilic était connu pour être une herbe qui "retire du cœur les vapeurs de mélancolie". Une autre tradition voulait qu’une femme qui reçoit une tige de basilic d’un homme en tombe amoureuse. Au XVIIIème siècle, l’actrice La Clairon faisait mâcher des brins de basilic à ses soupirants, et il existait des dragées aphrodisiaques au basilic confit dans le sucre, déjà réputées au siècle précédent. Jusqu’au début du XXème siècle, dans les futures provinces yougoslaves, lorsqu’une jeune fille tombait amoureuse d’un garçon peu recommandable, cet amour était connu pour être le fruit de l’action du basilic. En effet, se frotter la poitrine et le ventre avec ses feuilles ou respirer la fumée que dégage la plante brûlée incitait à la passion. Si en jetant des braises rouges sur deux feuilles de basilic, elles s’enflamment rapidement sans changer de place, le présage est excellent : le mariage sera placé sous les meilleurs auspices. En revanche, il vaut mieux rompre si elles se comportent comme deux diables plongés dans l’eau bénite. D’autre part, la feuille de droite indiquera une certaine réticence de l’homme à un engagement, tandis que celle de gauche sera le reflet de l’hésitation de la jeune fille. Une autre tradition nous dit que pour savoir si un jeune homme fera un époux fidèle, il faut lui glisser dans la main un brin de basilic. Si celui-ci dessèche, c’est un coureur de jupons. En Provence, dix gouttes d'alcool à base de basilic, de racine de céleri, de racine de serpentaire, d'huile de cumin et de sécrétion humaine constitue un filtre d'amour très efficace. A l’époque de la Révolution, il était utilisé contre la timidité et la mélancolie.
Se masser la nuit la région du cœur avec du basilic écrasé renforce les liens d’amitié qu'on a avec une personne.
Le basilic a été également associé aux scorpions. Les Italiens vouaient une grande admiration au basilic, bien qu’ils avaient très peur des scorpions censés se cacher sous leurs plants. Au Moyen Age existait une croyance selon laquelle les scorpions, engendrés par cette plante, vivaient sous les pots de basilic. On croyait aussi que le basilic aidait à enlever le dard des scorpions. On pensait également que mâché et placé au soleil, il donnait naissance à des vers. On dit par ailleurs que tant qu'il fait jour, la plante éloigne les chèvres mais, dès la nuit tombée, elle les fait danser.
Les commerçants italiens plaçaient souvent un pot de basilic près de leur caisse enregistreuse parce qu’un superbe plant équivalait à un négoce prospère.
Chez les Grecs, il était associé au deuil. C’était aussi une plante à forte connotation religieuse : les Romains associaient le basilic à certains rites religieux, comme symbole de la fertilité. Plus tard, le basilic fut considéré comme un remède absolu à la stérilité et aux douleurs de l’accouchement parce que ses brins avaient caché la Vierge et son enfant pourchassés par Hérode : une fois le danger écarté, la Vierge avait dit au basilic : « Dieu te sauve, tu fleuriras, et tu auras des graines ». C’est également la plante qui poussa autour du tombeau du Christ après sa résurrection. Les Egyptiens avaient découvert que le basilic était une herbe bactéricide pouvant servir à conserver les aliments et… les morts. Il fut particulièrement apprécié des chrétiens des Indes car il apparut miraculeusement en fleur sur la tombe de saint-François-Xavier[1]. En Inde, il y est élevé au rang d’herbe sacrée, on l’appelle Tulsi (plante sacrée) et on le cultive surtout autour des sanctuaires où il y fait l'objet d'un culte quotidien accompagné d’offrande de fleur et de riz. Des feuilles étaient posées sur la poitrine du mort de religion hindouiste, pour le protéger des esprits malveillants dans l’autre monde. Dans d’autres pays également, on plaçait une branche de basilic entre les mains du mort pour le protéger dans son voyage dans l’au-delà. Les Indiens utilisaient également le basilic comme symbole d’hospitalité.
Composante de la célèbre liqueur, la Chartreuse, la cueillette du basilic, plante magique, exigeait tout un rituel rappelant la cueillette du gui par les Druides. Le cueilleur (toujours un homme) devait se purifier les mains à trois sources différentes, se tenir hors de portée d’êtres impurs (femme ayant ses règles par exemple) et ne jamais couper les tiges avec un objet métallique. D’après un vieux manuscrit, ils devait porter des vêtements propres et prononcer ces paroles: « basilic je te prie par la divinité suprême qui t'a fait naître de guérir tous les maux, de venir à notre secours en apportant les remèdes qu'avec confiance je te demande ».
Pendant longtemps, le basilic a été considéré tantôt comme une plante comestible, tantôt comme une plante sauvage. En Europe occidentale, c’était aussi bien l’herbe du diable qu’une plante pour lutter contre les sorcières. Jadis les sorciers avaient recours au basilic pour provoquer des menstrues pestilentielles. Paradoxalement, cette plante a la vertu de protéger des sortilèges. On peut glisser une feuille dans sa poche pour bénéficier de ses pouvoirs.
Chez les Berbères nomades, le conseil de tribus est composé de notables, issus de familles les plus importantes. En cas de guerre, l’un d’eux est désigné comme chef et un bouquet de basilic est glissé dans les plis de son turban, en signe de ses fonctions exceptionnelles.
Dans la tradition persane, manger de la semence de basilic blanc le jour du Now-Rouz[2] met à l'abri des névralgies toute l'année.
De nos jours, on le dépose devant les portes et les fenêtres ouvertes en été, pour éloigner les mouches et les moustiques.
En cuisine, le basilic peut être conservé séché ou dans le vinaigre. Il met en valeur les préparations à base de tomate ; il doit toujours être ajouté juste au moment de servir.
En infusion, le basilic est diurétique et tranquillisant ; il est également tonique, stomachique, antispasmodique et emménagogue.
[1] 1506-1552, un des premiers membres de la compagnie de Jésus qui évangélisa l'Asie orientale et le Japon.[2] Fête du Nouvel An iranien tombant le 21 ou le 22 mars, selon les années.